En affaires, la confiance est primordiale. Les parties engagées dans un projet auront beau tout prévoir, tout calculer et tout inscrire dans des contrats blindés, la confiance prime sur tout. Mon fournisseur fera-t-il un boulot impeccable, livré à temps? Mon client paiera-t-il dans les délais? Mon banquier continuera-t-il de m’appuyer?
Pour un entrepreneur, la confiance placée dans ses partenaires fait partie des risques à gérer. Cette confiance se solidifie avec les années, mais elle peut s’effriter rapidement. Lorsque c’est le cas, l’effritement entraîne de l’incertitude, des délais et des coûts, des plaies que les entrepreneurs veulent fuir.
L’impact économique de ce cataclysme n’est pas facile à mesurer, mais les gens du milieu le sentent. Récemment, un ingénieur (honnête) me racontait la lenteur des prises de décisions dans les municipalités et ses conséquences sur son organisation. Une avocate me disait à quel point les procédures de certification de l’Autorité des Marchés financiers (AMF) donnaient du fil à retordre aux entreprises. Le président du Conseil du patronat du Québec (CPQ), Yves-Thomas Dorval, en convient: « le processus d’octroi de certains contrats est beaucoup plus long, la paperasse, plus volumineuse. Le climat psychologique est un problème », dit-il. M. Dorval donne l’exemple des entrepreneurs généraux, qui doivent s’assurer d’avoir des fournisseurs sans tache avant de soumissionner. Un processus qui alourdit les affaires.
Pour bien des gens, le constat est clair: une grande partie des gens d’affaires n’est pas digne de confiance.
Ce climat est malsain. Le Québec doit pouvoir préparer l’après-Charbonneau pour redorer le blason du milieu des affaires. Certes, la commission et les enquêtes sont un passage obligé qui n’arrive qu’une fois par génération. Certes, il faut s’assurer d’extraire les racines du mal, comme le disait mon collègue François Cardinal.
Le président du CPQ croit que ce sont les entreprises du milieu qui doivent travailler à rétablir cette confiance avec le gouvernement. D’une part, il faut punir les individus fautifs et les sortir de l’industrie. D’autre part, lorsque c’est possible, il faut assurer la pérennité de ce qu’on appelle les personnes morales, soit les entreprises.
Francis Vailles, La Presse Affaires - Mardi 14 mai 2013